L'occitan de l'avenidor/L'occitan du futur
projet soutenu par
Dans un avenir proche, l'occitan en France sera principalement parlé par des personnes qui ont été éduquées en français par leur famille et qui ont appris l'occitan à l'école ou dans le cadre de formations pour adultes.
Notre objectif est d'étudier les néo-locuteurs et néo-locutrices de l'occitan et la nouvelle variété d'occitan qu'ils et elles parlent.
Equipe
- Daniela Müller, LMU München
- James Costa, Université de Paris - Sorbonne-nouvelle
- Jean-François Courouau, Université de Toulouse 2 - Jean-Jaurès
- Fiona Gehring, Albert-Ludwigs-Universität Freiburg
- Hervé Lieutard, Université de Montpellier 3 - Paul-Valéry
- Daniela Marzo, Albert-Ludwigs-Universität Freiburg
- Rafèu Sichel-Bazin, Université de Toulouse 2 - Jean-Jaurès
Les néo-locuteurs et néo-locutrices de l'occitan
Nous avons collecté un total de 23 entretiens sociolinguistiques. En outre, nos participants ont complété le questionnaire psychométrique NEO-PI-R (Big Five), fournissant ainsi des mesures objectives de leurs personnalités pour compléter les données narratives issues des entretiens guidés. L'analyse des données sociolinguistiques vise à clarifier la situation des néo-locuteurs et néo-locutrices de l'occitan par rapport à d'autres langues minoritaires européennes mieux documentées, telles que le catalan, le galicien, le gaélique irlandais, le gaélique écossais et le gallois.
Présentation
"Erwerbswege und intrafamiliäre Weitergabe des Okzitanischen bei Neuen Sprecher*innen des Okzitanischen. Ergebnisse sprachbiographischer Interviews aus Montpellier, 2019" ("Parcours d'acquisition et transmission familiale de l'occitan chez les néo-locuteurs et néo-locutrices d'occitan. Résultats d'entretiens biographiques linguistiques à Montpellier, 2019")
Acquisition
Face à l'absence d'enseignement obligatoire de l'occitan dans le système scolaire du Sud de la France, et la rupture de transmission au sein des familles depuis au moins une, voire deux générations, quels sont les parcours d'apprentissage que choisissent les néo-locuteurs et néo-locutrices ?
Une décision consciente
Existe-t-il des moments décisifs dans la vie des néo-locuteurs et néo-locutrices où ils et elles ont pris la décision d'apprendre l'occitan, souvent lui consacrant une part significative de leur temps ? Un moment de révélation consciente est-il un prérequis indispensable pour passer de l'étape d'apprenant·e à celle de néo-locuteur ou néo-locutrice ?
Transmission
L'apprentissage d'une langue peut bénéficier de l'éducation formelle, mais pour la revitalisation d'une langue, une transmission intergénérationnelle au sein de la famille est cruciale. Dans quelle mesure les néo-locuteurs et néo-locutrices contribuent-ils et contribuent-elles à restaurer cette transmission ? En d'autres termes, l'occitan sera-t-il une langue maternelle pour les enfants des néo-locuteurs et néo-locutrices d'aujourd'hui, ou restera-t-il une langue seconde, constamment réapprise par des individus issus de familles francophones ?
Profil des néo-locuteurs et néo-locutrices
Les données psychométriques de la personnalité, combinées aux récits des entretiens, nous offrent-elles la possibilité de tracer le portrait-type de l'individu qui, ayant déjà appris l'occitan par le passé ou non (par exemple, dans une école maternelle ou élémentaire Calandreta), devient néo-locutrice ou néo-locuteur de l'occitan ?
La langue des néo-locuteurs et des néo-locutrices
Nous avons enregistré 15 participant·e·s parlant en occitan (L2) et en français (L1), constituant ainsi un corpus oral bilingue parallèle. Cette configuration nous permet d'explorer deux approches complémentaires : (1) une approche historique et synchronique de l'accent méridional en français, qui découle de l'apprentissage du français comme langue seconde par des locuteurs et locutrices de langue maternelle occitane, depuis le XIIIe siècle jusqu'au milieu du XXe siècle environ ; (2) une approche synchronique de l'accent occitan des néo-locuteurs et néo-locutrices, éclairée par les théories de l'apprentissage d'une langue seconde ou étrangère.
L'accent méridional du français
L'accent du français parlé dans le Sud de la France, largement partagé par la plupart de nos participant·e·s, est le fruit d'un transfert phonologique des caractéristiques de l'occitan. Pendant des siècles, l'occitan a été la langue maternelle de la majorité de la population de la France méridionale, principalement rurale. Cependant, les études approfondies qui détaillent la genèse de cet accent dans le cadre du bilinguisme font défaut.
Notre approche prend en considération non seulement les phénomènes clairement issus du transfert phonologique depuis l'occitan - tels que
(1) la réalisation régulière du e muet et sa possible postériorisation dans l'espace vocalique,
- Présentation "Occitan traces in the Southern French schwa"
(2) la prononciation partiellement orale des voyelles nasales suivies d'une consonne nasale,
(3) l'existence d'un accent de mot
mais également des phénomènes qui ont fait leur entrée dans le français méridional à une période relativement récente, ou qui se propagent actuellement :
(4) l'alternance conditionnée des voyelles moyennes, connue sous le nom de Loi de position,
(5) l'antériorisation de [ɔ],
(6) l'aspiration des plosives en fin de mot.
Alors que les phénomènes (1) à (4) constituent les caractéristiques traditionnelles du français méridional telles qu'elles sont répertoriées dans la littérature spécialisée, la présence des phénomènes (5) et (6), qui sont des traits marquants du français septentrional, témoignerait d'un possible nivellement de l'accent méridional vers le français standard.
L'accent néo-locuteur de l'occitan
Alors que l'accent français méridional conserve plusieurs régularités phonologiques directement héritées de l'occitan, ces traits ont maintenant tendance à s'effacer avec le nivellement de l'accent méridional vers le français standard, d'origine septentrionale.
Pour les néo-locuteurs et néo-locutrices de l'occitan, nous anticipons donc un transfert phonologique de la phonologie du français de référence (septentrional) vers l'occitan, inversant ainsi la situation qui a vu émerger l'accent français méridional il y a quelques siècles.
Étant donné que nous aurons connaissance des caractéristiques de l'accent français de chaque locuteur et locutrice de notre échantillon, nous pourrons évaluer directement le transfert individuel de la langue maternelle vers l'occitan.
Plus précisément, nous analyserons les points suivants :
(1) la centralisation de la voyelle atone de fin de mot [ɔ], étymologiquement liée au e muet français dans la même position ;
(2) la prononciation des voyelles suivies de consonnes nasales, qui devraient être orales en occitan ;
(3) la réalisation de l'accent de mot en occitan et l'éventuelle transition vers un accent de groupe ;
(4) le transfert de la Loi de position en occitan, malgré l'existence d'un contraste phonologique entre les voyelles antérieures mi-haute et mi-basse en syllabe accentuée ;
(5) l'adoption de l'antériorisation de [ɔ] ;
(6) l'adoption de l'aspiration des plosives en fin de mot.
Soutien financier
Nous remercions nos organismes de soutien :
- Müchnener Universitätsgesellschaft
- Nachwuchsförderungsfonds der Fakultät 13 der LMU München
- Centre de coopération universitaire franco-bavaroise (BayFrance)